Rencontre avec Nathalie Griesbeck

lundi 23 juin 2008 13:40 par Frédéric Niedzielski    Metz

Témoignage.

Nathalie GRIESBECK est aujourd’hui députée européen et conseiller général de la Moselle. Elle a été élue pour la première fois député en juin 2004 sur la circonscription du Grand Est.

Au Parlement, elle est plus particulièrement en charge des fonds structurels des vingt-sept pays de l’Union européenne, dont elle est rapporteur permanent au sein de la Commission des Budgets.


F.N. : Vous avez la responsabilité de 365 milliards d’euros de crédits qui sont notamment destinés à développer l’emploi et à accroître les compétitivités régionales et le dynamisme rural dans la totalité de l’Europe, et donc en France. Concrètement comment agissez-vous ?
N.G. : votre question est pertinente. Elle permet de souligner une différence essentielle entre les membres du Parlement européen et ceux du Parlement français. Cette différence à de grandes conséquences.

F.N. : Pourriez vous être plus précise ?
N.G. : La Commission européenne des Budgets possède des pouvoirs et des moyens d’action beaucoup plus étendus que ceux d’une simple commission du Budget à l’Assemblée Nationale ou au Sénat en France, puisqu’elle est co-décideur budgétaire, à égalité avec le Conseil européen. Ses membres disposent donc de véritables armes politiques pour peser sur l’élaboration comme sur l’exécution des budgets européens. Nous avons en particulier la possibilité de mettre en réserve les sommes prévues au Budget si les raisons avancées par la Commission européenne pour justifier leur emploi ne nous semblent pas convaincantes ou pertinentes. Et nous ne libérons les crédits que quand nous avons obtenu des réponses qui montrent que la dépense est pleinement justifiée et l’argent utilisé au mieux.
C’est vrai en particulier pour les fonds structurels pour lesquels j’ai été désignée rapporteur permanent au sein de la Commission des Budgets. Les montants concernés sont très élevés et donnent un peu le vertige. Mais il ne faut pas perdre de vue qu’ils sont destinés à la totalité de l’Union européenne, soit aujourd’hui vingt-sept pays et une population de près d’un demi-milliard d’habitats. Nous n’en avons pas toujours clairement conscience, car en Europe comme pour le reste, nous voyons surtout ce qui ne va pas, mais l’Union européenne, en dépit des difficultés de l’heure, est une vraie force, une force considérable à l’échelle du monde.

F.N. : A votre avis, qu’attendent nos partenaires de la présidence française, en particulier après le non irlandais ?
N.G. : Nos partenaires espèrent une présidence efficace, pragmatique, dynamique et humble autant que concrète. Mais, si j’en crois les séances de travail préparatoires à la présidence française que je viens d’avoir à Paris avec le Premier ministre François FILLON et avec les principaux ministres concernés, il demeure aujourd’hui du côté français encore bien des incertitudes, voire parfois des approximations. Avec une exception notable et heureuse : celle de Jean-Pierre Jouyet, qui, il faut le souligner, connaît fort bien ses dossiers. A cela vient s’ajouter le non de l’Irlande au traité de Lisbonne dit « simplifié ». Ce revers vient bien évidemment tout compliquer.

F.N : Le non irlandais place-t-il l’Europe en situation de crise ?
N.B. : Il s’agit bien d’une crise. Mais peut-être cette leçon un peu rude, portera-t-elle ses fruits. On est en droit de l’espérer. Pour que cette présidence puisse être utile pour l’Europe et, par-là même, pour la France, je suis certaine en tout cas qu’il faut qu’elle ne soit ni pensée, ni voulue, ni perçue comme une présidence plus ou moins hégémonique de la France, mais simplement comme la présidence française de l’Union européenne.
C’est ainsi que nous pourrons commencer à combler le fossé qui ne cesse aujourd’hui, comme on le constate de se creuser. Il faut au contraire que, dès la présidence française, apparaissent la volonté et de la capacité de protéger les valeurs de liberté, de diversité, de solidarité et de respect de l’autre qui fondent pour nous l’Europe.

voir aussi la Semaine de l'Europe
[1] le jour ou tout a débuté : le 25 mars 1957
[2] Conseil européen : là où tout se décide