ne pas descendre du vélo...

jeudi 15 janvier 2009 08:00 par JPJ    Metz

Je n’en connais pas de faciles, je n’en connais que de fragiles… avant de susurrer aux femmes qu’il les aime, Julien Clerc nous les décrit ainsi… Fragiles. Le mot est précieux et on devrait l’encadrer. Le mettre en évidence  dans la vie puisqu’on se donne le mal de le faire sur des cartons d’emballage. Avec un grand point d’exclamation après.

Fragile. Le mot m’est revenu à l’esprit plusieurs fois au cours de ce week-end. Non pas sur le registre de la crainte,  mais sur celui des enjeux de cette attention à porter aux gens. Plus nécessaire encore à l’heure où  la perception orchestrée des choses et des événements finit par compter plus que leur  réalité elle-même. La crise dans laquelle nous sommes entrés en donne un bon exemple. A force d’en rajouter avec la même énergie mise un temps à la nier, ne sommes-nous pas tout simplement en train de nous paralyser collectivement. Un peu comme si nous étions tous descendus de vélo pour nous regarder pédaler. Pour voir si la chaîne tiendra le coup et si le guidon est assez serré. L’équilibre dynamique qui faisait avancer trop vite parfois devient  un déséquilibre assassin.
Une enquête dans le Nouvel Obs de la semaine dernière analysait le sujet et aboutissait à la conclusion qu’il fallait avant tout redonner du sens à notre action, à notre course. Que c’est ce sens qui nous donnerait envie à nouveau d’acheter une voiture ou d’investir dans une maison bien plus qu’une prime à la casse ou un bonus fiscal. Il faudra aussi admettre  pour cela que le calendrier des soldes et le thermomètre quotidien de la fréquentation des magasins en France, en Belgique et au Luxembourg qu’on nous étale et interprète  depuis deux semaines n’est pas forcément le nombril du monde.

Fragile…. j’avais choisi d’aller voir les deux films que nous recommandait Fernand Joseph Meyer dans notre numéro 200. Deux horaires un peu saugrenus  comme celui d’un dimanche à 13 h 30 et la minuscule salle 3 du Caméo où flotte une odeur que les temps de gel comme ceux d’orage n’arrangent guère. Heureusement à la sortie il y aura un café et une pâtisserie chez Jean tout en haut de la Fournirue. Un îlot de tradition, le souvenir de chocolats chauds et de boulets de Metz de mon enfance avec ma mère. Quand le bulletin scolaire avait été bon. Parcelle d’inaccessible derrière les grilles vertes en fer forgé dans  la vitrine de ce qui était alors la pâtisserie Braun. Un privilège qui pouvait se déguster aussi chez Roggie rue Serpenoise.  
Au Caméo , le patron dans son édito nous dit que les crises précédentes avaient le mérite de remettre les gens ensemble, dans la rue ou dans une proximité culturelle. Que cette fois  le numérique a fait voler en éclats !
Deux films donc. « Il divo »  ou la vie de Julio Andréotti. La solitude d’un personnage à l’ambiguïté fascinante, sept fois président du Conseil en Italie. Il arrache la page d’un roman quand risque d’apparaître  le nom de l’assassin.   « L’apprenti » aussi. L’histoire de ce jeune gamin du Jura en stage dans une ferme où il apprend la vie au cul des vaches, aux bouches des filles, aux lèvres de son maître et sur un air de Johnny. Il rate son année. Les flammes comme les femmes et les hommes sont fragiles, elles consument en même temps qu’elles éclairent, brûlent en même temps qu’elles chauffent…. parcelles de vie individuelles que nous risquons d’oublier tant elles nous sont parfois livrées à la pelle. Mon copain Pierre-Louis Basse sur Europe recevait un cégétiste pour parler des invisibles de PSA à Sochaux.  Ces intérimaires et ces CDD dont l’emploi ne sera pas supprimé puisqu’il n’a jamais vraiment existé. Des variables d’ajustement qu’on disait il y a peu. Justement, on le disait…

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