expérience nancéienne

jeudi 5 février 2009 11:30 par Pierre Taribo    Nancy

Attention où vous mettez les pieds !

Malgré un départ calamiteux et des problèmes multiples, le tram sur pneus de Nancy est un vrai succès commercial. De tramway nommé “Désir” celui de Nancy est très vite devenu celui des soupirs, voire du ridicule. Et si aujourd’hui, il ne s’appelle pas “désillusion”, c’est parce que sa fréquentation ne cesse d’augmenter.

C’est d’ailleurs tout le paradoxe de cette étrange chenille qui glisse lentement le long de la ligne 1 – un tronçon de 11 km dont 8 en voie réservée, entre Essey-lès- Nancy et le CHU de Brabois – tantôt en mode routier tantôt en mode guidé. Car pour le reste que d’avanies. Entre un coût de maintenance trop élevé et des avatars à n’en plus finir, l’engin sur pneus, sorti des ateliers Bombardier a maintes fois frôlé le bide.

Passons sur les problèmes liés aux travaux. C’est le lot commun de toutes les villes qui adoptent ce mode de transport en commun dont l’arrivée s’accompagne inévitablement de perturbations et de nuisances. Lorsque les choses se passent bien – comme à Strasbourg par exemple – les inconvénients du chantier sont assez vite oubliés. Mais quand la mise en service, tourne au fiasco, le tramway en prend pour son grade.

le moteur sur la chaussée
Il faut dire qu’à Nancy, le système sur pneus a accumulé les déboires. Pourtant, lorsqu’en 1998, la Communauté Urbaine du Grand Nancy opte pour cette technologie supposée mieux convenir aux villes moyennes, personne n’imagine les lourdes conséquences de cette décision. C’est tellement vrai que trois lignes sont prévues pour un budget chiffré à 236 M d’euros. On met alors en avant la qualité du service rendu et le côté innovant de la solution retenue. Bref, la CUGN présidée par André Rossinot et le constructeur affichent une volonté partagée de doter Nancy des meilleures infrastructures en la matière. Sauf que la lune de miel ne va pas durer.

Après l’inauguration en grande pompe de la ligne 1 par Bernadette Chirac, la vie rêvée du tram nancéien tourne au désastre, voire à la farce lorsqu’une rame perd son moteur sur la voie publique. A cette époque on ne compte plus les dysfonctionnements : arrêt d’exploitation d’un an, retard de livraison des rames, polémiques sur la sécurité. On en passe et des gratinées. Pourtant malgré cette Berezina, ni André Rossinot réélu en 2001 ni le tram ne feront plouf !

ne pas réactiver le serpent de mer
Au contraire, la chenille tant décriée connaît un vrai succès commercial. Archi-bourrée aux heures de pointe, la ligne a franchi allègrement le seuil des 40 000 voyageurs. Preuve que le besoin existe et que sourds à l’écho de ses tracas, les Nancéiens se sont appropriés le tram.

Reste qu’avec un bilan aussi mitigé, l’odyssée du tramway pourrait bien s’achever avec la ligne 1. Certes, un projet de ligne 2 avec des trolleybus à guidage optique existe, mais échaudés par l’expérience précédente, les élus s’entourent logiquement d’un mur de précautions avant de se prononcer sur un calendrier.

Alors si le pire n’est jamais sûr, on peut tout de même donner ce conseil aux décideurs messins dont les neurones se focalisent sur le dossier du busway : attention où vous mettez les pieds, surtout en période de crise.. On peut, il est vrai, s’étonner de voir l’agglomération messine à la traîne dans ce domaine où du Mans à Nice en passant par Grenoble, Montpellier, Clermont-Ferrand, Orléans, Nancy chaque ville a sauté dans le tram en marche. Au tour de Metz ? Avant de trancher, les acteurs concernés par cette décision, doivent évaluer le montant de l’addition et ne pas se tromper sur le choix de la technologie.

Car il ne s’agit pas de donner une brusque phase d’accélération pour réactiver un serpent de mer. Il s’agit de transporter vite, mieux et dans des conditions écologiquement au top, les usagers qui sont aussi des contribuables.