control

vendredi 5 octobre 2007 11:16 par Fernand-Joseph Meyer    

d'Anton Corbjin
avec Sam Riley, Samantha Morgon, Alexandra Maria Lara, Joe Anderson.

1977 en Angleterre, du côté de Manchester, dans le quartier de Macclesfield... Les hauts-fourneaux sont déjà muets, les petites maisons de mineurs s'alignent toujours dans les rues grises... Le glamour ne suinte pas vraiment sur les murs de la ville... Les adolescents éclusent des bières, écoutent David Bowie, Lou Reed ou les Sex Pistols... Ce fut un temps que même les moins de vingt ans ne peuvent ignorer... Une figure tragique marque un groupe de rock novateur : Ian Curtis, le chanteur du groupe Joy Division qui allait connaître un succès démentiel. Ian, tout jeune et furieusement beau, peine à quitter sa vie ordinaire et à se cogner avec la gloire et les tentations qui en bordent les chemins.

Marié et père précoce, Ian se dépatouille aussi avec son épilepsie. « Je côtoie la vie du mieux que je peux » mais, un jour, il perd le contrôle. Comme dans « She's Lost Control », une des chansons les plus célèbres de Joy Division...

Nous sommes à mille lieues des "Biopics" courants (« Ray » ou « La Môme », dont la probité ne peut être niée) et ça fait le plus grand bien. Ajoutons que c'est plein de couleurs noires, blanches et mélancoliques, que la bande-son n'est en rien synthétique ou réchauffée et que Sam Riley n'a rien à voir avec les coqueluches hollywoodiennes.
Anton Corbijn est d'abord connu comme photographe. Il a « shooté » toute la scène rock des vingt dernières années (Metallica, U2, Red Hot Chili Peppers...) et réalisé des floppées de clips (pour Tom Waits, Depeche Mode...). « Control » couvre les trois dernières années de la vie de Ian Curtis. Lui et son groupe allaient connaître la gloire aux Etats-Unis. Le 18 mai 1980, Ian n'avait que 23 ans, il bascule et le cinéaste  fait preuve d'une délicatesse extrême pour nous raconter la brève vie de celui qui aurait « voulu être une sérigraphie d'Andy Warhol ». Le procédé du noir et blanc n'esthétise en rien le film et Sam Riley n'est jamais réduit à une icône de mode - malgré les mèches très travaillées... .
Les cadrages conçus au cordeau se fondent à la fluidité de la narration. Aucune graisse de pathos n'alourdit le film qui est avant tout une histoire d'amour bouleversante, éloignée de toute reconstitution historique ou d'une quelconque religiosité pour un mythe du rock. On y verra aussi un film social qui rend compte de la collusion entre la crise économique et la culture rock qui en colmate le mal-vivre.