Verlaine ...

jeudi 15 mai 2008

... ou le coup de la cravate

Pauvre Lélian, c’est l’anagramme de Paul Verlaine. C’est aussi le nom du buste dédié à ce poète né à Metz. Une œuvre en bronze signée James Vibert, qui chaque année est ornée d’une cravate pour célébrer l’anniversaire de sa naissance. Un hommage lui a été rendu par l’Académie Ausone et le Cercle Verlaine.

Petite précision pour les puristes : Paul Verlaine est né en 1844, le 30 mars. Et cette année, l’hommage traditionnel avait un mois de retard. Ceci en raison des travaux de pavage effectués en contrebas de l’Esplanade, près de la fontaine des grottes et du buste du poète planté dans un parterre de fleurs printanières. Mais pourquoi une cravate ? Il semble que cette tradition soit d’origine estudiantine. Une blague de potache reprise le plus sérieusement du monde par des inconditionnels du poète.
« Je suis né à Metz et bien que n’ayant aucune attache de famille en cette ville dont me voici par un hasard de garnison, je revendique d’autant plus ma qualité de Lorrain et de Messin, que la Lorraine et Metz sont plus malheureuses, plus douloureuses. » C’est Verlaine qui, au soir de sa vie se souvient de sa ville où « riait son enfance ». Dans son « Ode à Metz », un poème de soixante-dix vers daté du 17 septembre 1872, il pleure sur le destin de la cité et se souvient de Metz, « son berceau fatidique ». Paul Verlaine, ne passa, en réalité que trois années à Metz. Son père, capitaine au 2° Régiment du Génie, y est affecté, une première fois au début de l’année 1842. Il s’installe, avec son épouse, dans un appartement situé au premier étage du numéro 2 de la rue Haute-Pierre.
C’est là que le petit Paul est  né le 30 mars 1844, vers 21 heures. 13 mois plus tard, l’officier doit rejoindre la garnison de Montpellier. La famille garde toutefois le bail de l’appartement  et y revient trois ans après,  jusqu’en juin 1850. C’est donc entre 5 et 7 ans que Paul Verlaine vécut, entre Esplanade et cathédrale. Les faits qu’il rapporte et les images qu’il évoque dans  « Souvenirs d’un Messin »,  « Confessions » , et  « Enfance chrétienne »  manquent parfois de précision, mais ils nous rappellent l’ambiance de Metz au milieu du XIXe siècle.
Ses pages nous donnent quelques belles images comme la cathédrale et ses vitraux dont les « couleurs parlaient si féeriquement », l’Esplanade, où une petite Mathilde  Leneveux de 5 ou 6 ans, la fille aînée du bâtonnier,  lui fit découvrir le vert paradis des amours enfantines, le défilé du Graouilly « monstre en carton qui faisait peur », les parades et exercices militaires « dont les détonations ébranlaient nos vitres et mes jeunes nerfs… ».
Verlaine a lancé la notion de « poètes maudits » après avoir découvert Baudelaire, l’abstinthe, la fameuse Fée verte, puis rencontré sa femme Mathilde Mauté qu’il quitte quand Arthur Rimbaud surgit dans sa vie. En 1894, il est couronné « Prince des poètes » avant de s’éteindre en 1896, à l’âge de 52 ans.

Un buste en bronze
23 ans après la mort du poète, Metz, redevenue française, lui rend un premier hommage à travers une plaque commémorative apposée sur sa demeure natale, 2 rue Haute-Pierre. Deux ans plus tard, grâce à une souscription publique, le musée de la ville fait  l’acquisition de son portrait, peint par Aman-Jean. En 1925 est érigé, au pied de l’Esplanade, son buste réalisé en bronze par un artiste suisse James Vibert. Les Amis de Verlaine avaient ouvert une souscription pour cette statue qu’ils auraient bien voulu mettre sur l’Esplanade à la place de la Source, la nymphette nue de Charles Pêtre, qui choquait leurs regards. C’est ce buste qui chaque année est gratifié d’une cravate.

L’histoire dit que des étudiants auraient lancé les années suivantes cette mode de la cravate, le jour de son anniversaire.  Peut-être pour se souvenir d’un Verlaine amateur de beuveries et aux mœurs « coupables ». Peut-être pour le rendre plus respectable. On dit aussi que ce geste aurait valu, en mars 1941, une nuit de prison à un potache pour trouble à l’ordre public.
Depuis 1981, des membres de l’Académie Ausone, formée de poètes et écrivains messins font revivre cette tradition. Bien que vissé sur son fauteuil roulant, Kléber Drouhin, le président de cette académie a été fidèle cette année encore, à cette manifestation.  Tout comme Paulette Merpillat, présidente par intérim des « Amis de l’Académie Ausone ». Professeur d’allemand, puis documentaliste, cette passionnée n’a pas manqué de déclamer quelques vers. « Verlaine est pour moi une invitation au voyage. Il est aussi une chance pour Metz. » Yves Kessler, un ami de la poésie s’est chargé d’accrocher la cravate autour du buste de Verlaine, alors que Bernard Hamon a retracé la vie de Verlaine en 1868.
Le poète n’est plus si maudit puisque l’Université de Metz porte désormais son nom depuis le 1er janvier 2005.


A la prochaine semaine ...

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