le Deuxième souffle

mercredi 31 octobre 2007 11:31 par Fernand-Joseph Meyer    

d’Alain Corneau
avec Daniel Auteuil, Michel Blanc, Monica Bellucci,

Jacques Dutronc, Nicolas Duvauchelle, Gilbert Melki, Eric Cantona Gustave Minda dit Gu est un malfrat majeur de la littérature policière. José Giovanni l’introduit dans la Série Noire en 1958. Avec l’adaptation cinématographique de Jean-Pierre Melville en 1966, Gu incarné par Lino Ventura devient un mythe. Quarante ans passent et c’est le moment choisi par Alain Corneau pour faire revivre Gu à l’écran. Il purge une peine de prison à perpétuité. Il réussit à s’évader. Manouche, la femme qu’il aime, ses amis – les vrais et les autres – l’aident à revivre. Gu, tributaire de son âge – une belle cinquantaine -, s’accorde une deuxième chance pour retrouver son identité.

Le commissaire Blot qui se sent pareillement usé, persévère pour le neutraliser, l’éprouver et le faire exploser en vol… Gu, confronté à la trahison, veut d’abord démontrer qu’il ne fait pas partie des « bourgeois de la truanderie »…

Est-ce un travers français  que de pousser des cris d’orfraie dès lors qu’un cinéaste s’arroge le droit de refaire un film classique ? Après tout, Losey a refait Fritz Lang (« M. le Maudit ») et Bunuel a filmé « Le Journal d’une femme de chambre » après Jean Renoir. Sans oublier Gus Van Sant qui a commis un copier-coller avec « Psychose »… Le film d’Alain Corneau est une belle réussite qui est aussi nocturne que celui de Jean-Pierre Melville était diurne. Autres différences marquantes : Corneau situe l’action au début des années 60 et la part amoureuse incarnée par Monica Bellucci (Manouche) est plus saillante.

Inutile de parler de « remake », ni même d’hommage à Melville. Corneau, auteur de quelques films noirs inoubliables (« France, société anonyme » ou « Série noire »), nous offre un film original. Tout en jouant avec les codes du film de gangsters et en revendiquant les influences qu’il partage avec des cinéastes asiatiques (Johnnie To, John Woo), Corneau filme avec bonheur une intrigue dense déployée par des personnages véritablement fouillés. Au risque assumé de la stylisation kitsch, il réussit à arrimer son film à la réalité et à l’émotion, loin du naturalisme et du mélo.

Plongé dans le noir, le film entier est irradié par le rouge et le vert. L’abstraction ne leste pas pour autant les comédiens, toujours très physiques, avec une prédilection pour l’ambiguïté. Ce qui est idéal pour savourer un grand film qui n’a rien à envier aux « blockbusters » étasuniens.