Lady Jane

jeudi 17 avril 2008 11:20 par Fernand-Joseph Meyer    

de Robert Guédiguian
avec Ariane Ascaride, Jean-Pierre Darroussin, Gérard Meylan, Jacques Boudet, Yann Tregouët.

Un trio d’anciens petits truands se reforme pour venir en aide  à l’un  d’entre eux. On a kidnappé le fils de Muriel qui tient à présent une  boutique de semi-luxe dans un quartier cossu d’Aix-en-Provence. Muriel,  le manteau de cuir noir bien calé sur ses épaules, contacte René et  François. Avec eux, elle jouait les Robin des Bois dans les quartiers  populaires de Marseille en redistribuant par exemple les fourrures  volées. René, désabusé et fatigué, gère une boîte de nuit. François  s’occupe d’une petite affaire de bateaux et mène une vie de famille  étriquée. L’appel de Muriel lui file quelques ardeurs. René est moins  déterminé. Sous forme de course-poursuite menée tambour battant, le  film est lancé...

Après l’évocation de François Mitterrand (« Le Promeneur du  Champ-de-Mars ») et un salutaire « Voyage en Arménie », Robert  Guédiguian revient à ses sources majeures : Marseille – sans l’Estaque  et ses variations pagnolesques -, Aix et toute sa troupe de comédiens.  Il s’essaie au film de genre. Et il nous offre  du noir, du très noir.  Comme déjà dans « La Ville est tranquille », le cinéaste ne nous ménage  guère. Son polar est nerveux, charpenté autour d’une intrigue haletante  avec une prédilection pour les séquences nocturnes, les parkings  coupe-gorge, les froides lumières d’un port à la fin de l’hiver et  d’autres lieux sombres. L’enlèvement devient un prétexte littéral pour  renouer avec toutes les questions d’ordre politique qui ont toujours  veiné ses films. Les dernières séquences marquent cependant un  déséquilibre et le film fonctionne besogneusement à la façon d’un  épilogue tortueux par lequel tout devrait s’éclaircir. L’explication  s’avère tortueuse comme si le scénario était trop bien écrit. On  pourrait décrocher. On retrouve avec émotion quelques-unes des  petites  musiques de Robert Guédiguian : la solidarité éprouvée par les  priorités individualistes, la mémoire malmenée et partout la nostalgie  qui révèle juste la mélancolie de ceux qui voudraient rester « jeunes  comme les morts ». Ce qui est presque naturel dans le film noir - la  vengeance – habite tout le film et en nourrit les épisodes les plus  fulgurants. « J’ai cru que tu allais ramener du sens ! », voilà ce que  Jean-Pierre Darroussin reproche à Ariane Ascaride quand il admet que le  bonheur l’a dépassé. Robert Guédiguian n’y déroge pas. Il ne filme pas  gratuitement. Du sens, il en met partout. La modération n’aurait pas  été superflue.