la révélation du temple

jeudi 16 novembre 2006 15:00 par JPJ    Metz

Depuis le temps qu'on en parlait et que le Conseil général de la Moselle communiquait sur son exposition des Huguenots, sur celle qui l'avait précédée sur le même thème il y a un an à Berlin, sur celle consacrée à Pompéi qui suivra l'an prochain à Bliesbrück, sans oublier celle des dragons de Manderen qui crache encore son feu en quelque endroit de la planète …on avait fini par considérer les Huguenots comme une belle transition certes, mais déjà connue. D'autant plus que l'expo était appelée à se dérouler en un lieu, le Temple Neuf à Metz,  devant lequel on passe plus qu'on ne le fréquente. Les Huguenots ? un thème ressenti peut-être aussi comme un trop intellectuel, ou historique. Les guerres de religion et les exodes, l'intégration et les rejets, les voltes face politiques et les  abjurations… mettez le 20 heures et vous avez tout ça, le loto et la météo en prime.
Et puis l'autre jour, à l'occasion de la visite de presse, j'ai éprouvé cette envie d'aller jeter un coup d'œil, de franchir ce drôle de sas construit devant l'entrée du temple. Et il n'en faut pas plus pour que cette exposition s'entrouvre à vous,  qu'elle vous happe, vous plonge dès l'antichambre dans une atmosphère très particulière de réception et de perception. Elle vous enroule d'abord dans l'évocation d'un contexte de mots et de faits, d'inventions et de dogmes. Une histoire qu'elle déroule ensuite avant de vous faire emprunter le chemin des huguenots, celui de la foi en général, de la vie mais aussi de la ville de Metz. L'espace, jusque-là canalisé  s'ouvre alors sur ce temple que vous découvrez enfin. Pas si petit finalement et tellement multiple ; les angles de mise en scène sont recherchés, taillés dans ce volume comme les facettes d'une pierre précieuse ; partout la lumière est belle, à chaque fois pourtant elle est différente ; les tons choisis semblent être ceux de la mode. Ils sont ceux du temps plus que d'une tendance, jouent avec les pièces présentées comme avec votre esprit. C'est une autre histoire de vous-même qui se compose sous vos yeux et vous ouvre des chemins.  Chemin des autorités accrochées à leur pouvoir. Chemin des fidèles attachés à leur foi. Chemin des prédicateurs, de ces hommes dont les mots changent le monde. L'exposition est un judicieux mélange de connaissances que vous aviez déjà, remises plus précisément dans leur contexte, et de découvertes. Elle vous inscrit dans une démarche collective impressionnante…
Quand, aux deux tiers du parcours vous arrivez sur la mezzanine vous avez envie de vous poser un instant. A cet endroit les tons sont clairs et doux. La voûte du temple et tout son volume, sa clarté retrouvée s'offrent à vous pour une méditation. Sur l'homme et son destin, sur la tolérance et les conflits, sur l'intégration… sur cette vie dans laquelle on se contente si vite d'une version caricaturale quand il s'agit des autres et où nous n'en finissons pas de polir les subtilités, les lignes de fuite quand il s'agit de la nôtre.
Le temps d'un instant et vous reprenez contact avec la matière, avec le quotidien parfois exceptionnel de ces hommes qui étaient aussi des artisans, des orfèvres, des cuisiniers. Les plantes et les légumes qu'ils ont fait connaître à Berlin constituent une sorte de bouquet final. L'évocation des contes de Perrault et de Grimm ajoute un nouveau lien de cousinage, de culture et de rêve partagés.…
Ces huguenots là sont  plus que de l'histoire, ils sont un présent… et l'expo est un cadeau. A partager puis à porter dans son cœur ou dans sa tête pour qu'il rende plus pertinent notre regard, plus déterminée notre démarche.

PS : Les originaux de l'édit de Nantes et de Fontainebleau présentés dans une chapelle annexe pendant le premier week-end n'y sont plus.  Mais peu importe, c'est de bien autre chose qu'il s'agit !