l’Assassinat de Jesse James

mardi 16 octobre 2007 17:40 par Fernand-Joseph Meyer    

d’Andrew Dominik avec Brad Pitt, Casey Affleck, Sam Sheppard, Mary-Louise Parker, Sam Rockwell.

Le titre complet du film précise que c’est « le lâche Robert Ford » qui a commis le forfait. Tout est dit. Ce n’est guère grave puisque l’histoire de Jessie James – et de son frère Frank -, on la connaît depuis belle lurette. Nous sommes quelque part entre le Kansas, le Missouri et le Nebraska, au moment de la guerre de Sécession. Le bandit qui sévit dans l’Ouest éternel, nimbé d’une légende épaisse, semble usé, fatigué et même un peu désaxé. Lui et son frère sont en fin de parcours, presque hors-jeu, et la plupart de leurs complices sont en prison. Jesse craint les représailles de la part de ceux qui se sont mis en tête de se couvrir d’argent et de gloire. Une nouvelle recrue arrive dans la bande du desperado. C’est Bob Ford, un admirateur qui n’a que dix-neuf ans, fragile, un peu jaloux et complètement fasciné par Jesse. Au moment où celui-ci compte dévaliser une banque, Bob passe à l’acte…

Ce n’est pas un “ouesterne” ordinaire. C’est plutôt un western métaphysique qui s’écoule durant cent soixante minutes pleines et qui prend son temps pour échafauder des séquences intenses, y installer ses héros fatigués et les perdre quelque peu. C’est aussi un risque – mineur - pour le spectateur. Sauf que l’ennui n’est pas garanti. Heureusement. Andrew Dominik est ce cinéaste néo-zélandais qui nous a surpris avec « Chopper » (2001) et qui vient œuvrer à Hollywood comme Ang-Lee qui, lui, nous a dévoilé le magnifique « Secret de Brokeback Mountain ». Coups de feu, chevauchées, saloons et poussières sont au rendez-vous. Les silhouettes inscrites dans les vastes paysages – avec ou sans soleils sanguinolents – nous rappellent sans dommage John Ford, Anthony Mann ou même Terrence Malick. L’esthétisme « clicheteux » s’en mêle par moments. On le supporte moins quand la voix off évoque en plus un livre d’images pieux. Mais Andrew Dominik réussit avant tout le portrait de Bob Ford, un jeune homme singulier que la fascination pour son héros dédouble et laisse en déséquilibre sur la délicate balance d’un narcissisme qu’il assume sans aplomb. Nicholas Ray (« The True Story of Jesse James ») et Samuel Fuller (« J’ai tué Jesse James ») étaient déjà sur la même piste. Brad Pitt incarne Jesse James avec une force saisissante. C’est Casey Affleck (révélé par Gus Van Sant dans « Gerry ») qui surprend. On le retrouvera – et, espérons-le, moins starifié que son partenaire.