compense toujours

jeudi 12 février 2009 08:00 par JPJ    Metz

Même si la navigation à vue s'est érigée au cours des derniers mois comme l'un des arts majeurs de la conduite gouvernementale en France et dans le monde, certaines improvisations et autres bluffs n'en continuent pas moins à nous surprendre. Ainsi celle qui consiste pour Nicolas Sarkozy à déclarer tout de go,  lors d'une soirée de bal médiatique à l'Elysée, qu'il va supprimer la taxe professionnelle sans vraiment dire par quoi il va la remplacer. Ainsi encore celui qui lui permet d'affirmer  qu'à Gandrange ma foi, tout ne va pas si mal  Madame la marquise. Mittal y tiendrait  presque toutes ses promesses et Sarko va venir lui-même s'occuper des petits « fours » restants. Pas sûr qu'il ait cette fois  le champagne qui va avec.

Alors qu'Obama s'échine à faire voter le plus rapidement possible ses 800 milliards pour la relance (un chroniqueur a calculé que cela équivalait à un peu plus d' un million de dollars par jour depuis la naissance du  Christ), alors que le Pape se prend les pieds dans de vieux tapis qu'il avait délibérément laissés traîner derrière son siège au point que ce sont les fidèles qui y perdent une deuxième fois leur latin, … notre président nous annonce donc qu'il va supprimer la taxe professionnelle.

Loin de moi l'idée d'écrire un lamento pour un impôt, d'autant plus que celui qui s'appliquait aux entreprises  était considéré comme excessivement lourd, particulièrement mal fichu et bêtement calculé. Sa suppression faisait partie des promesses électorales présidentielles qu’il était de bon ton d’émettre depuis plus de vingt ans. De ne pas trop y croire. Tant mieux donc  pour nos entreprises si il disparait  demain mais cette même taxe était la ressource presque unique des intercommunalités à qui ce gouvernement vient de demander,  il y a quelques semaines, comme un acte de civisme,  de pousser les feux.  D'investir, de lancer des grands travaux afin de soutenir l'activité.
L'investissement public représente en effet plus des deux tiers des sommes engagées dans le pays. Vous conviendrez qu'il est assez scabreux de demander à des élus de s'y lancer pour vingt ans  au moment même où la recette qui permet de le financer disparaît. Une recette que, dans l'ancien système, on pouvait espérer accroître du fait même  de la dynamique économique liée aux investissements. Un cercle vertueux en quelque sorte.

« Rassurez-vous braves gens, on va vous compenser » dira dès le lendemain François Fillon. « On »  c'est l'Etat bien sûr et son trou sans fond d'avant la crise qui semble même être devenu un trou sans bords. Mais admettons. C'est la notion même de compensation qui me chagrine car je n'y vois guère une pratique très dynamique. Créer ainsi des vases communicants entre ce qu'on supprime et ce qu'on crée ailleurs (car il faudra bien trouver d'autres richesses) ne fait que donner un rôle essentiel au tuyau qui unit les vases. Et qui pourra étrangler quand bon lui semblera, même si cela fait avec douceur, le passage. Et puis on compensera quoi ? La richesse existante, celle qui est en train de disparaître, celle qu'on aurait pu créer…. Celle des régions ou des secteurs qui seront politiquement corrects, qui auront leur pourcentage de logements sociaux ou autres ?  On risque surtout de figer tout un système, de renvoyer les responsables financiers des collectivités à leurs calculettes et à l'examen des trente-six changements de lois ou de règlement qui seront intervenus au cours de l'année pour déterminer la moyenne des évolutions de ceci ou de cela.

La chasse aux taxes pour payer la fin de la pub sur l'audiovisuel public n'est pas encore terminée qu'il va falloir se mettre à celle pour les ressources destinées à compenser les communes privées de taxe professionnelle. Peut-être par un impôt sur les sociétés ou la fameuse taxe carbone ! Carbone, comme ce papier qui permettait un certain  temps de recopier en double avant de finir par s'user lui aussi.

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