commerce : anciens contre modernes

dimanche 11 janvier 2009 15:10 par RS    Thionville

Le triomphe de la discorde !.

Les animations commerciales de Noël n’ont pas été la réussite espérée à Thionville, et déjà des voix s’élèvent pour demander la démission du président de l’association des commerçants. Ou plus exactement, se font désormais entendre. Car c’est bien depuis sa prise de fonctions, en mars, que Philippe Hausherr est décrié.
Une véritable guerre des anciens contre les modernes, dans laquelle on aurait bien du mal à dire qui est le plus en tort, mais qui empêche tout simplement aujourd’hui l’Apecet d’avancer.

Lundi soir, à Thionville, les membres du comité de l’association des commerçants (l’Apecet) se sont réunis pour la première fois de l’année. Dès le 12 janvier, ils dresseront, à l’occasion d’une seconde réunion et en compagnie des représentants de la mairie et de la chambre de commerce, le bilan du marché de Noël 2008. Trois jours plus tard, ils se livreront à l’étude du dossier Fisac de la ville au cours d’une troisième réunion en quelques jours...

Départ sur les chapeaux de roue qui annonce des changements menés tambour battants ? Ou manière habile de créer en permanence l’information pour mieux se mettre à l’abri d’éventuelles critiques ? Car dans la coulisse, tout est loin d’être aussi rose que cela pourrait paraître. L’Apecet a certes connu cette année une belle hausse du nombre de ses adhérents (215 contre 180 en 2007). Mais ces derniers semblent condamnés à ne jamais réussir à s’entendre. Sorte de guerre des anciens contre les modernes réduite à l’échelle d’une ville et revisitée pour le commerce par les partisans de la continuité et ceux du renouveau qui ne cessent de se renvoyer critiques et amabilités. Dans ce joyeux climat de tensions, personne ne veut bien sûr « créer la polémique », ni même « l’alimenter ». N’empêche que les accusations des uns et des autres fusent. Et que pendant ce temps, loin de faire gagner le commerce, Thionville fait surtout triompher la discorde.

difficile transition
Deux camps pour deux visages d’une même association. A la tête des modernes - souvent des commerçants nouvellement implantés à Thionville et qui n’ont que peu connu les années de présidence de Nino Quaranta – Philippe Hausherr, président en fonction depuis mars dernier. Un homme nouveau, gérant d’une institution thionvilloise, l’hôtel-restaurant « Le Concorde », dont les méthodes séduisent autant les uns qu’elles peuvent déranger une autre partie, tout aussi légitime, des membres de l’association et des commerçants de la ville. Ceux souvent implantés à Thionville depuis plus longtemps, qui ont connu les coups d’essai et les changements successifs de ses commerces, et dont l’imprimeur Gérard Klopp s’est fait le porte-parole : les anciens. Membre de l’association et du comité depuis 1970, l’homme a vu passer, comme il le dit lui-même, « un certain nombre de présidents » et son constat est sans appel : « celui là n’est pas bon ! » C’est lui qui porte la première estocade. « Quand Philippe Hausherr a fait part de son envie de devenir président de l’Apecet, Nino Quaranta (NDLR : gérant du magasin « Photo Quaranta » depuis 1970 à Thionville et président durant 14 ans) lui a proposé d’assurer à ses côtés une année de transition. Philippe Hausherr a refusé. La suite ? Nino Quaranta a été sali sur des blogs et Philippe Hausherr élu avec un beau programme mais c’est un phraseur voilà tout. Un phraseur et un pleurnichard puisqu’un mois plus tard, il se plaignait déjà auprès de la municipalité de ne pas avoir de résultats parce qu’on lui savonnait la planche. Ce n’est pas sérieux... »


association ouverte
Le coup est porté. Appuyé même par deux actions symboliques. Les démissions de Nino Quaranta et de Gérard Gallois, ancien gérant du restaurant « Les Sommeliers ». « J’ai toujours défendu des valeurs commerciales, travaillé pour la ville » explique Nino Quaranta. « J’ai démissionné, je n’ai donc pas à commenter des décisions auxquelles je ne prends plus part mais je regrette qu’on m’ait ainsi poussé vers la sortie. Thionville avait été primée deux fois par la Chambre de commerce pour ses animations sous ma présidence. Aujourd’hui, l’orientation donnée est tout autre. Comme si rien n’allait auparavant mais je n’ai pas à rougir de mon bilan ». Des démissions et quelques coups de gueule. Comme celui de Philippe Vouillaume, autre commerçant thionvillois. « La jeunesse, c’est bien. Il faut du renouveau. Mais aussi de la concertation. Et Philippe Hausherr a tendance à ne concerter que lui-même... » Une accusation qui revient en boucle dans la bouche des commerçants opposés au “système Hausherr”.

Une organisation qui se prétend pourtant basée sur le renouveau, et dont le « seul but » serait de « redynamiser » le centre-ville, à en croire le président de l’Apecet. « L’association appartient aux commerçants. Derrière les reproches qui me sont faits, il y a, dissimulé, celui d’avoir ouvert les portes de l’Apecet au plus grand nombre. Mais nous avons besoin de la participation de tous pour réussir dans nos entreprises. 215 adhérents, ce n’est pas assez. Je me félicite du nombre élevé de membres du comité ayant répondu présent lundi soir. 18 sur 21 contre les 5 que nous étions en décembre, c’est formidable. Mais je travaillerai avec des gens qui veulent faire bouger les choses et avancer. Pas avec ceux qui ne sont là que pour critiquer et vouloir toujours reproduire les mêmes schémas qui ne fonctionnent pas. L’intérêt du commerce à Thionville est de faire toujours plus de choses et pas forcément comme elles ont été faites jusque-là ».

dialogue de sourds
Un argument qui ne justifie pas les prises de décisions unilatérales du président selon Gérard Klopp. « L’Apecet ne s’est pas rendue à la table des négociations avec la municipalité concernant les animations de Noël. C’est Philippe Hausherr seul qui l’a fait. Et qui a ensuite placé le comité devant le fait accompli en annonçant que la mairie s’occuperait désormais des animations de rues et nous des animations commerciales. Même le contrat d’animation avec la radio NRJ et l’emplacement des chalets rue Gœrges Ditsch avaient été décidés sans que personne n’ait son mot à dire. Alors que nous aurions pu faire valoir notre expérience et expliquer à ce nouveau président, cette nouvelle équipe municipale que cela avait déjà été fait et n’avait pas fonctionné. Ce n’est pas une question de susceptibilité mais de fonctionnement. Quand on a la chance d’avoir 20 personnes prêtes à se retrousser les manches et de l’expérience à côté de soi, on fait travailler toutes les bonnes volontés et on se laisse dire quelque chose ». Philippe Hausherr ne s’en laisse pas conter pour autant. Il rend même coup pour coup. « On ne peut tout de même pas aller à 20 négocier avec la mairie ! Deux ou trois tout au plus. Mais des gens positifs. Je ne vois pas l’intérêt d’amener à la table des négociations des gens qui émettront un avis contraire au mien juste pour le plaisir de me contredire. Et puis ce qui dérange beaucoup, c’est que je ne suis pas pour que les membres du comité fassent des bénéfices sur le compte de l’association. Monsieur Klopp imprimait jusqu’ici nos publicités et flyers. Ce n’est plus le cas car j’ai trouvé moins cher et cela ne lui plaît pas. Quand je prête le Concorde à la mairie pour lancer Thionville Lumières, c’est de la publicité pour l’Apecet et la mise à disposition est gratuite... il y a selon moi un enseignement à en tirer ».

bilan mitigé
Reste qu’à se passer la patate chaude sans écouter l’autre, le bilan de ces animations de Noël 2008 organisées par l’Apecet devrait se révéler plutôt mitigé. Et qu’un peu de dialogue à défaut d’entente aurait certainement permis de trouver un compromis plus efficace entre valeurs sûres et modernisme. Philippe Hausherr avoue que « le marché de Noël ou la halte-garderie ont moins bien fonctionné » que les bottes de Noël ou les lutins dans la ville.
Gérard Klopp regrette que la publicité et les moyens déployés n’aient pas été à la hauteur. « Pas de musique, des chalets peu décorés, c’était bien trop triste pour une ville comme Thionville ». Et tous veulent à présent bâtir un centre-ville plus fort, où le commerce prendrait réellement l’ampleur qu’il mérite. Seul problème : ils ne souhaitent pas le faire ensemble. Les uns attendant avec impatience de voir un autre président prendre la tête de l’association en mars. Les autres que le comité soit renouvelé et que plus de jeunes commerçants se retrouvent aux commandes.

Bref, une vraie guerre des générations, qui, on l’espère, prendra fin d’ici quelques mois... L’important étant peut-être finalement d’avoir simplement des commerçants unis. Et peu importe qu’ils soient empreints de modernisme ou fiers des valeurs passées.