ensemble, c’est tout

jeudi 5 avril 2007 16:00 par JPJ    Metz

Paru aux Editions Le Dilettante, le roman d'Anna Gavalda m'avait laissé sur ma faim. Une de ces  faims subtiles, teintées de regret que l'on éprouve  au bout de quelques centaines de pages d'un livre lorsque l'épaisseur de ce qu'il vous reste à parcourir se réduit inexorablement et que vous n'avez tout simplement pas envie que cela se termine. Parce que vous vous sentez bien avec les protagonistes, bien dans l'histoire, bien dans le rythme. Bien avec l'auteur, une étonnante jeune femme  sans provocation ni scandale, jolie, sans fards ni poignards, découverte quelques années plus tôt dans un autre texte plus concis :  " J'aimerais tant que quelqu'un m'attende quelque part ". Avec " Ensemble, c'est tout ", il y a trois ans, Anna Gavalda s'était manifestement libérée de la peur de n'être pas entendue ou attendue. D'où un livre fluide comme un film de Claude Sautet, une sorte de  " Camille, Franck, Philibert, Paulette et les autres " avec une touche de " Garçon ", une plongée dans un univers de sentiments d'une belle simplicité autour de la solitude. Ou de son absence. Ce qui finit parfois par revenir au même. Le succès d'édition avait été au rendez-vous et il devrait accompagner l'adaptation au cinéma qu'a réalisée un autre Claude. Berri celui-là.
C'est à cela que je pensais, samedi,  calé dans un fauteuil du Palace en attendant le début de la séance. Le temps de feuilleter, presque mécaniquement, la brochure du Caméo et d'y parcourir l'édito du patron de ces salles nancéiennes et messines de cœur de ville, d'art et d'essai en général. Familier d'un style plutôt direct quand il s'agit de tailler des croupières aux  grands multiplexes et autres circuits commerciaux ainsi qu'à leurs cartes illimitées,  Michel Humbert lance cette fois un cri d'alarme : " Les Cameo(s) sont aux urgences ". Les années de forte fréquentation du cinéma en France, nous dit-il, ne sont par forcément de bonnes années pour le cinéma d'art et d'essai. " Tout se passe comme si les spectateurs délaissaient les films les plus pointus au profit de films plus consensuels ". Du coup il manque à ses salles quelque 30 000 entrées et rien ne va plus.  Deux phénomènes sont montrés du doigt.
A Metz c'est le " sentiment qu'il est impossible de stationner à proximité " alors que le parking Cathédrale  " vous accueille pour 50 centimes d'euro les 6 heures ". Comme le Saint-Jacques d'ailleurs depuis deux ans… A partir de 20 h seulement dans ce cas mais avec une nouvelle qualité de signalétique à vous couper le souffle. Des petites lumières rouges et vertes vous guident et, à peine les portières ouvertes, une voix  vous accueille en vous rappelant le numéro de votre place. Presque mieux qu'au Palace où la caissière garde le nez dans son livre tout en vous rendant la monnaie…
A Nancy, c'est la bourre que se tirent UGC et Kinépolis, à coup de programmation mitraillette et de cartes miraculeuses qui a faussé  le marché. Elle  menace directement la survie du Caméo et risque d'entraîner à terme la disparition d'UGC, " programmée en haut lieu ". Michel Humbert invite la communauté urbaine de Nancy à l'aider faute de quoi il appellera au soutien actif des cinéphiles. Un scénario connu, mais cela n'a pas l'air d'être du cinéma..
En attendant, " Ensemble c'est tout ", c'est très bien. Alors, ne le manquez pas !

PS : Fernand-Joseph Meyer n'est pas tout à fait de mon avis (voir page 30 du n°108).