Luxembourg - Perpignan

lundi 4 août 2008 09:20 par DB (clp)    Bettembourg

Premier bilan timide d'exploitation.

Thierry Le Guilloux assure depuis trois mois, la direction générale de la Société Lorry-Rail, société luxembourgeoise installée à Bettembourg. Ce spécialiste du transport de voitures a une mission claire : donner l'impulsion commerciale et assurer le développement de cette  unique autoroute ferroviaire européenne de longue distance.

Les résultats mitigés pour cette première année d'exploitation vous paraissent-ils surmontables ?
La société a fêté son premier anniversaire au printemps dernier, mais l'activité commerciale n'a démarré effectivement qu'en novembre 2007. Avec en prime de démarrage, deux semaines de grève sur le réseau français qui n'ont pas forcément facilité l'intégration et  la mise en circulation des premiers trains de camions. L'équipe en place au lancement de la société s'est attachée principalement à mettre en cohérence toute la logistique nécessaire à une telle activité et à assurer les bons relais avec les différents partenaires du projet. Ce qui n'est jamais une tâche facile.  

Aujourd'hui, il faut donner à l'entreprise et  surtout à son concept, une plus grande visibilité dans le monde du transport routier européen et continuer à convaincre les professionnels que faire le choix du ferroutage sur grande distance est un bon choix économique et financier, qui peut être rapidement rentable. Ce qui n'est pas insurmontable à prouver car les arguments sont là pour convaincre, à l'exemple des transporteurs qui ont déjà choisi ce mode alternatif de déplacement et en sont satisfaits.
Mais nous sommes dans un monde professionnel qui, par définition  bouge sans cesse, où la concurrence est vive et dont les acteurs ne sont tentés par l'innovation que lorsqu'ils sont assurés de faire le bon choix. En clair, pourquoi changer ses habitudes, si celles-ci donnent satisfaction.
 
Le Grenelle de l'Environnement préconise le développement des autoroutes ferroviaires, notamment pour contribuer à la baisse d'émissions des gaz à effet de serre. Comment réagissent les professionnels de la route ?
L'argument a son poids  et au plan de l'environnement, cette volonté et cette détermination des pouvoirs publics est assez naturellement partagée, surtout au niveau des idées. Qui s'opposerait en soi à des mesures visant à protéger son propre environnement ?

Toutefois, quand il faut passer aux actes, la logique pour un transporteur routier, et d'une manière générale pour une entreprise à vocation commerciale, est d'abord d'ordre économique. Je n'ai pas encore rencontré véritablement une compagnie qui soit venue me voir spontanément en me disant choisir le ferroutage pour des raisons d'environnement et d'écologie. Ce qui ne veut pas dire que l'idée n'est pas dans la tête du client, mais les intentions exprimées sont davantage matérielles et pragmatiques. Avec des sensibilités variables suivant les contingences.  Ainsi,  les récentes hausses du pétrole, nous ont fait venir de nouveaux clients qui se sont rendu compte qu'ils pouvaient faire des économies dans le ferroutage. Si demain les pouvoirs publics décident de mettre en place à destination des transporteurs routiers, des aides, des taxations ou des allégements fiscaux en contrepartie de ce choix de transport, les autoroutes ferroviaires pourront se développer. En sachant aussi que l'Europe est partie prenante dans ce processus au travers de son programme Marco Polo visant à promouvoir les modes de transport alternatifs à la route, tels le rail et le fluvial.

Tout n'est pas gagné d'avance mais tout peut être tenté. C'est aussi l'engagement qu'ont pris les actionnaires de Lorry-Rail (la Caisse des Dépôts, le Groupe Vinci, la SNCF, la CFL et Modalhor, le constructeur des wagons), lors de la constitution de l'entreprise.

Aujourd'hui, le transporteur qui a choisi votre autoroute ferroviaire, rencontre-t-il encore des problèmes ?
Globalement non. L'activité a été revue techniquement, affinée et les tarifs ont été repensé et réadapté dans le cadre d'offres commerciales. Nous avons bon espoir de voir venir nous rejoindre d'ici la fin de l'année, quelques opérateurs espagnols et scandinaves.

Il subsiste toutefois encore quelques faiblesses qui nous ralentissent, notamment en terme de gabarits sur certains types de grandes remorques, dans le transport de marchandises réputées dangereuses pour lesquelles nous attendons encore certaines autorisations et dans la possibilité d'avoir des itinéraires de délestage en cas de problèmes sur le réseau français. Nos trains circulent actuellement sur des axes bien déterminés et nous sommes tributaires des travaux et aléas des opérateurs français. Et là nous avons parfois des surprises.